Un événement : la création de Maurice Demers

Un événement : la création de Maurice Demers« Futuribilia » © Photos et montage Maurice Demers

Voilà un homme dont on entendra parler. Jusqu’au 20 avril, de 14 h à 20 h (fermeture, entre 16 h et 18 h), ne manquez pas de faire une visite à Futuribilia. Il s’agit d’une exposition captivante qui offre de la participation. Elle se tient dans l’atelier du jeune Demers, au 6613, rue Saint-André, station Beaubien (dans la ruelle, en somme, de la Plaza Saint-Hubert, côté est). Demers offre un vaste ouvrage, avec capsules en lévitation, radeau basculant, qui prend sa source dans les jeux, les appareils des parcs d’amusement. Il donne la main à Mousseau, Lemoyne, Péloquin et Duguay. C’est un homme d’une simplicité exemplaire. Il est loin de la prétention d’un Molinari, par exemple. Dessinateur commercial, il décide de s’adonner à la céramique et puis à la sculpture « Pop » (il a exposé au « Gobelet » l’an dernier) et puis il met « en chantier » ce décor, cette expo d’environnement qui métamorphose ce troisième étage minable en un lieu mystérieux. Futuribilia c’est un peu le parc Belmont, le Gyrotron de la Ronde, c’est aussi la discothèque, le film d’horreur, mais en douceur, l’ambiance chez « Barbarella » ou chez « Mademoiselle Jodelle ». Avec des moyens très modestes, beaucoup de temps et de patience, une équipe décidée, dont son frère qui a construit tous les murs mous et mobiles avec du tissu et des ventilateurs, une trame sonore du genre « Labyrinthe » ou le Xénakis du pavillon de la France. Maurice Demers vient de prouver, hors de tout doute, qu’il est un artiste, un vrai créateur. C’est fort. Les restrictions proviennent d’un manque d’argent. Qu’un mécénat épaule sans tarder ce chercheur visuel. Le Maire Jean Drapeau vient de découvrir en lui un « designer » de calibre international. Manufacturiers de jouets, propriétaires de discothèques, vous aviez Mousseau, sachez que vous avez aussi Maurice Demers. La salle rouge d’une ambiance vraiment poétique est un délice. La bleue un miniparc. Demers a le sens du « jeu ». C’est une notion sacrée. L’art en a grand besoin, l’ère des loisirs, plus que jamais? Demers? Un citoyen important.

Claude Jasmin
Sept jours, 24 au 30 mars 1968.